LA PAGE SAADANE BIENTÔT TOURNEE
Les vacances sont finies. On reprend le collier…Mais rien de nouveau dans le discours de notre coach national. Ses propos du 9 Août, précédant la joute amicale face au Gabon, sont quasiment la copie conforme de ceux ayant précédé les matches face à la Serbie et l’Eire, en Mars et Mai respectivement. « Le résultat de ce match n’a pas d’importance…il nous permettra de jauger l’état de forme des joueurs…qui ne sont pas actuellement à leur meilleur niveau…nous allons faire tourner l’effectif et préparer la Tanzanie. » Une appréhension, réelle ou feinte, est exprimée au sujet des échéances officielles futures, avec une nouveauté : « Le mois de Septembre a toujours été un mois difficile pour les Algériens…et en Septembre, l’équipe ne sera pas au même niveau que celui affiché en Afrique du Sud. » Il conclut de façon péremptoire : « Nous ne serons pas prêts pour la Tanzanie ! » Ainsi chacun est averti…
Encore une invention cette histoire de « Septembre noir » ! La vérité vraie est que depuis qu’il dirige la sélection, Saadane a joué 5 matches durant ce mois. Il n’en a perdu aucun : 3 victoires (en officiel) et 2 nuls (en amical, gagnés d’ailleurs aux tirs au but). Il doit aussi avoir la mémoire très courte, puisque les deux derniers matches, joués tout deux en Septembre et en plein Ramadan, remontent à 2008 et 2009 face au Sénégal et à la Zambie et s’étaient achevés par des victoires. Encore une fois notre coach national parle pour ne rien dire !
Et d’ailleurs comment peut-on motiver des joueurs avec de tels propos ? Alors même que l’on sait que beaucoup d’entre eux sont là pour conquérir ( ou conserver ) une place de titulaire, comme en témoigne la présence du gardien de but M’bolhi malgré le décès de sa mère ! Et l’on sait que, même au cours des entraînements, les joueurs défendent âprement leurs chances, parce qu’ils n’aiment pas perdre !! Il est certes important de mettre en garde ses joueurs contre l’arrogance, la suffisance, l’excès de confiance et contre l’attitude visant à mésestimer l’adversaire. Mais est-il pour cela nécessaire de leur tenir un tel langage frileux pour ne pas dire défaitiste ? Le coach demande à chacun de « garder les pieds sur terre » et d’oublier la CAN et la CdM ! Sans doute estime-t-il que notre équipe a été au sommet de son art, lors de ces deux phases finales. Il ne sait pas que les Algériens ont en fait « les pieds sous terre » depuis le début de l’année 2010.
Saadane annonce que Lacen a été dispensé du stage, car il est en rééducation. Par ailleurs, le défenseur Laïfaoui est autorisé à demeurer auprès de son club de l’Entente de Sétif engagé en Champions League africaine. Saadane révèle que la non convocation de Chaouchi était le résultat d’une sanction : « Chaouchi doit savoir que l’équipe nationale n’est pas un club. Chaque écart de discipline est passible de sanction. » Ce sont là ses mots. Quel acte d’indiscipline ? Nature et durée de la sanction ? Silence des agneaux !! Chacun est alors en droit d’accorder du crédit à la version qui prétend que Fawzi Chaouchi se serait rendu coupable d’une tentative d’agression contre le Dr Hakim Chalabi, médecin consultant pendant le Mondial 2010, qui l’aurait jugé inapte à jouer.
Le match face au Gabon qui coïncide avec le début du mois de Ramadan a lieu tard le soir, à 22 h 30. Contrairement au mois d’août 2009, lors de la rencontre face à l’Uruguay, le stade du 5 Juillet est loin d’être plein.
M’bolhi est dans les buts, Saadane présente une équipe en 3-5-2 . Les 3 défenseurs sont Bougherra , Medjani qui débute et la surprise Mesbah, transformé en défenseur central. Le milieu du terrain est occupé par Kadir, Yebda, Guedioura, Boudebouz et Belhadj. En attaque on retrouve le duo Djebbour-Ghezzal. Pendant 5 bonnes minutes les algériens vont monopoliser le ballon par des échanges répétés assez encourageants. Ils obtiennent 2 corners et Ghezzal inscrit même un but justement refusé pour hors jeu. Les gabonais reviendront bientôt dans la partie. Ils font preuve d’un très bon niveau technique, leur jeu est simple mais assez précis, leur cohésion semble affirmée, car ils vont déjà menacer l’arrière –garde algérienne qui est obligée de se dégager en catastrophe par Medjani 2 fois.
Devant, Djebbour se complique la vie en faisant des choix discutables et perdra ainsi 4 ou 5 ballons inutilement. Ghezzal est mis entre parenthèses. Guedioura n’est vraiment pas dans son jour. Yebda n’est pas physiquement au point, cela se note. Boudebouz et Kadir, tous deux chargés de l’animation, ne vont pas jusqu’au bout de leurs idées. Pas de passes décisives dangereuses mais souvent un jeu limité à de petits espaces qui s’achève de façon brouillonne. Le côté gauche de l’arrière-garde algérienne ne fonctionne pas du tout. Les gabonais ont dû s’en rendre compte puisque toutes leurs attaques ont lieu de ce côté-ci.
A la 35° minute, Belhadj cafouille et offre la balle à Aubameyang qui lui fait face à 1 mètre. L’attaquant gabonais ne se fait pas prier pour partir et lancer Cousin qui a croisé sa course, prenant de vitesse son vis-à-vis Medjani. Il reçoit la passe à l’intérieur de la surface, prend le temps de se retourner à moitié et marque sous le ventre de M’bolhi imprudemment sorti à sa rencontre. On le sait, les buts s’inscrivent sur des erreurs défensives. Dans ce cas précis il y en eut 3 consécutives : Belhadj généreux, Medjani peu attentif et M’bolhi qui n’aurait eu aucun mal à stopper le tir de Cousin s’il était resté sur sa ligne.
Déjà désenchantés par la prestation médiocre de leurs poulains, les spectateurs vont désormais encourager les gabonais en martelant de «ouis » sonores tous leurs échanges. Des sifflets retentissent lorsque l’arbitre marocain envoie les deux équipes aux vestiaires.
A la reprise l’attaquant Ziaya prend la place de Yebda. Choix offensif s’il en est, puisque en première mi-temps les nôtres n’avaient pas adressé un seul tir en direction des buts adverses. En même temps Ghezzal recule d’un ou même de deux crans en se retrouvant parfois en position de latéral droit se substituant ainsi à Kadir qui va reculer lui aussi pour occuper la position de Yebda.
Ce schéma n’offre pas plus de satisfaction à l’ensemble. Le milieu de terrain est bien quadrillé par les gabonais et aucun ballon ne parvient donc à Djebbour et Ziaya. En face on joue toujours aussi simple et sans multiplier les passes, on arrive très souvent à mettre les Verts hors de position. Sur l’une de ces actions, à la 55° minute, Cousin se déporte complètement sur la droite et aisément, depuis la ligne de but, sans être contré par Medjani qui lui fait face, il va pouvoir adresser un centre précis sur la tête de son compère Aubameyang bien placé dans les 6 mètres algériens. Il prend le meilleur sur Bougherra et Mesbah et son coup de tête ne laisse aucune chance à M’bolhi.
Quelques minutes plus tard, Abdoun, l’éternel remplaçant, succède à Mesbah. La tonalité du match va rester la même, jusqu’à 10 minutes de la fin, quand les gabonais fatigués ou satisfaits du résultat, laisseront l’initiative aux algériens. Ces derniers vont s’emparer du ballon, lancer des attaques infructueuses, plutôt désordonnées, obtenir des corners et finalement réussir à inscrire un but de la tête par Djebbour sur une bonne remise de Guedioura. Pendant les 5 minutes restantes et les 4 minutes de temps supplémentaires accordées par l’arbitre, les Verts pousseront encore mais en vain.
Le public qui avait depuis longtemps pris à partie le camp algérien va se déchaîner en insultes et quolibets déplacés contre Saadane. A tel point que ce dernier refusera de parler à la presse et il n’y eut donc pas de conférence d’après match. On ne connut point l’avis de Gerhnot Rohr, le coach du Gabon et le soin fut laissé à l’adjoint Zoheir Djelloul de mettre la défaite sur le compte des absences de Yahia, Ziani, Matmour et Halliche ainsi que sur le manque de compétition. Celle-ci une fois de plus étant une piètre excuse car les joueurs gabonais sont tous des expatriés en Europe qui eux aussi « manquent de compétition ».
Il s’agissait d’un match de reprise certes. Mais en réalité ce que l’on a vu c’est la continuité : dans le manque de créativité et d’imagination de nos joueurs, auquel il faut ajouter que Saadane continue de faire jouer certains éléments à des postes tout à fait inédits et inattendus : Mesbah défenseur central, Kadir milieu récupérateur et dernière nouveauté en date, Ghezzal arrière droit. En 49 minutes, Le malheureux Ziaya n’a pas hérité d’une seule balle exploitable. Et Djebbour demeurera prisonnier de deux parfois trois défenseurs adverses. Boudebouz, si habile dans les tirs de loin ne s’est pas du tout laissé tenter par un tel exercice et Kadir a toujours été loin des zones décisives gabonaises. Le résultat final, c’est donc la continuité dans la défaite. Les joueurs devaient y être mentalement préparés après avoir pris connaissance des paroles de Saadane durant sa conférence de presse : « Nous ne serons pas prêts ».
En raison des retraits et forfaits survenus durant le stage, Saadane n’a effectué que 2 substitutions au lieu des 6 autorisées. Des 4 gardiens de but convoqués, 1 seul a joué tout le match !
A cause de l’heure tardive du match et du weekend qui suivit, ce n’est que le samedi que la presse algérienne va commenter cette défaite (1-3). Même El Moudjahid, d’ordinaire si « compréhensif » n’hésite pas à écrire : Les Verts ratent leur rendez-vous avec leur public du 5 Juillet…l’Algérie transparente avec les mêmes carences offensives…piégée par le Gabon. »
La Tribune pour sa part rapporte « l’inquiétude des supporteurs et des observateurs…aucune construction de jeu, aucune cohésion…fragilité tactique… » Liberté titre : « Ces Verts qui font craindre le pire…un groupe sans âme , amorphe, acceptant la défaite, incapable de réagir…La rue gronde contre Saadane…un échec supplémentaire dans la gestion de l’EN…qui repose la question de [son] maintien. » El Watan constate : « Après la lamentable sortie face au Gabon, l’EN sème le doute sur son avenir. » A l’étranger on notera le commentaire du site FIFA.com. Sous le titre « L’Algérie retombe dans ses travers ». Le commentateur enfonce le clou : « Pour sa rentrée après sa décevante Coupe du Monde, conclue sans inscrire le moindre but, {l’Algérie] n’a pas redonné le sourire à ses supporteurs.... »
Dès le 17 Août Saadane, sans doute très pressé, rend publique la liste des 22 joueurs retenus pour la rencontre officielle contre la Tanzanie, prévue le 3 Septembre à Blida ? Pourquoi le vendredi 3 ? Mystère ? Naguère, Saadane expliquait qu’il préférait jouer le dimanche afin de gagner 2 jours de stage supplémentaires. Dans la liste, le quatrième gardien Si Mohammed Cedric a disparu, sans avoir été testé face au Gabon. Un nouveau, Mohammed Chakouri, qui joue latéral droit à Charleroi est présent. Chadli Amri retrouve la sélection. A-t-il regagné la confiance du coach ? Yahia suspendu et Lacen blessé sont absents. Pour le reste, ce sont les mêmes joueurs déjà convoqués pour le match du Gabon. Parmi eux, Foued Kadir, gravement blessé 4 jours plus tôt avec son club et qui sera probablement forfait.
Importante évolution, le 21 Août le président de la FAF annonce le démarrage dès le 24 Septembre du premier championnat professionnel avec deux Ligues 1 et 2 composées de 16 clubs chacune ( voir les détails dans les chapitres Champ 4 et Champ 5).
Le stage précédant la rencontre face à la Tanzanie a lieu au Cercle militaire de Beni Messous à Alger. Au cours du point de presse qu’il a animé quelques jours avant le match, Saadane a réitéré ses craintes à propos de cette période de la saison. Néanmoins il affirme : « Nous devons battre la Tanzanie… » La décision de jouer à Blida « a été prise avec les joueurs…Nous avons un public magnifique…C’est en ces moments difficiles que nous avons besoin de nos supporteurs. » Foued Kadir blessé est remplacé dans la liste, par le gardien Si Mohammed Cedric, resté dans les tribunes lors du match amical face au Gabon.
Saadane n’a pas su ou voulu profiter de 2 jours de stage supplémentaires et c’est donc le vendredi 3 septembre que la sélection algérienne se présente dans une formation de 3-5-2 avec Ghezzal au poste d’arrière latéral droit…un poste qu’il avait inauguré lors de la seconde période contre le Gabon mais qu’il n’avait jamais occupé dans son club de Sienne. Le weekend précédent, avec son nouveau club de Bari, face à la Juventus de Turin, Ghezzal portait le n°11 et avait joué tout le match dans la position d’ailier gauche…Comprenne qui pourra ? Un attaquant sacrifié qu’il fait reculer alors qu’il avait, lors de sa conférence de presse déjà mentionnée, exprimé le vœu que " le compartiment offensif soit inspiré le jour du match."
En défense et devant le gardien M’bolhi, on trouve Bougherra et Halliche. Au milieu Guedioura, Yebda, Belhadj, Ziani et Boudebouz. En attaque Ziaya est titulaire pour la première fois et va seconder Djebbour. A noter que M’bolhi, Halliche, Belhadj et Yebda n’ont encore joué aucun match de championnat.
Dès l’entame de la partie les algériens vont presser très haut et monopoliser le ballon. Ils bénéficieront d’une multitude de corners et de coups francs bien placés mais tous très mal exécutés et ne débouchant donc sur rien de positif. Bien regroupés en défense devant leur excellent gardien, les tanzaniens dominés sont malgré tout en mesure de mener par passes courtes des contre attaques dangereuses. Sur l’une d’entre elles Guedioura commet une faute inutile. Le coup franc qui suit, accordé aux 30 mètres environ va faire mouche car, malheureusement, après 3 années, Saadane n’a pas su apprendre à ses joueurs comment faire un mur. Le tir puissant d’Idrissa Radjabou est en effet passé au beau milieu d’un trou béant créé par Ziaya abandonnant sa place au sein de la barrière. A la surprise générale la sélection algérienne est menée 0-1. Pas de panique, cela était déjà arrivé et à Blida par deux fois !
Cinq minutes plus tard, un contre rapide faillit coûter un second but n’était le sauvetage in extremis de Bougherra. Toutefois la pression algérienne ne se dément pas, mais elle est désordonnée et inefficace. Et c’est d’une initiative individuelle que l’égalisation est obtenue juste à la mi-temps. Par l’intermédiaire d’un magnifique tir des 30 mètres de Guedioura qui ira se loger dans la lucarne de Shabani Kado. Il est permis d’espérer.
La seconde période sera la répétition de la première en ce qui concerne la domination inorganisée des camarades de Ziani. Avec cette différence que les tanzaniens recroquevillés en défense ne représentent plus aucun danger. Ils laissent le soin à leur gardien de « sauver les meubles ». Et il s’en acquittera de la meilleure des manières. Medjani remplace Halliche à court de condition. Les entrées de Abdoun et Amri à la place de Boudebouz et Ziaya ne changeront rien à la physionomie du match, ni au tableau d’affichage.
Chacun ressent une grosse frustration devant ce nul (1-1) et le public de Blida imite celui d’Alger et n’épargne pas Saadane qualifié de tous les noms d’oiseaux ! Certaines manchettes de journaux spécialisés se passent de commentaire. Le Buteur : « Même à Blida, on ne veut plus de Saadane. » Compétition de son côté titre : « Saadane , prends ta valise. » Hué après le ratage du Gabon, Saadane avait évité de parler à la presse. S’agissant d’une formalité obligatoire lors d’un match officiel, il va donc consentir cette fois-ci à donner son avis à la fin du match. Il félicitera les joueurs « qui ont fait leur devoir et ont réalisé un grand match…Je n’accepte pas qu’on m’insulte…Si c’est moi le probléme , je suis prêt à partir. »Il terminera toutefois en se projetant vers l’avenir en disant : « Il nous faut gagner les 5 matches qui restent. »
Ce sera là le dernier match international de Karim ZIANI après huit années de "bons et loyaux services" avec 62 sélections en équipe nationale.
La nuit a dû être très longue, ardue et certainement décisive, car, dès les premières heures de la matinée du lendemain, la FAF annonce que Saadane a présenté sa démission au président de la Fédération qui l’a acceptée. Une nouvelle reçue tel un vrai soulagement pour beaucoup de gens, tant le coach national semblait vraiment tourner en rond, au bout du rouleau. Usé par la pression, incapable de se remettre en cause ni de remettre l’équipe en ordre de marche, Rabah Saadane jette l’éponge après 36 mois de dur labeur, récompensé par une qualification pour la CAN et la CDM, mais ô combien ingrat et difficile comme seul peut l’être le travail d’un entraîneur de football.
Ce développement fait oublier déjà les 2 points perdus à domicile. Le soir, une bonne consolation attendait les supporteurs des Verts… A Rabat, le Maroc se montra incapable de battre la modeste équipe de Centre Afrique (0-0), dernière du classement FIFA. Et voilà donc les 4 équipes du groupe D à égalité de points…
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