UNE PERIODE INSTABLE
Le Ministre des Sports et le Président de la Fédération sont toujours en place et il va falloir procéder à la nomination d’un nouveau sélectionneur. Le nom de Mohammed Maouche est cité avec ceux de Bouzid et Zitoun. Ce sont en fait ces deux derniers qui vont se charger d’un court intérim qui leur vaudra un long et beau voyage vers l’Indonésie, où doit se dérouler un tournoi amical. Les nouvelles sont rares, mais on finira par apprendre, par des dépêches d’agences, que l’Algérie l’avait emporté en finale (1-0) face à la sélection locale grâce à un but de Nasser Bouiche. Sur le chemin du retour, la sélection nationale s’arrête à Kuala Lumpur où elle réalise le nul (2-2) contre la Malaisie. Pour ce long déplacement, Bouzid et Zitoun avaient incorporé de nouveaux visages : Kechamli, BOUKHARI, AMANI, NEGGAZI, A. BELGHERBI etc…en compagnie de quelques « anciens » tels Jefjef, les deux Bouiche, Nacer et Nasser qui n’avaient pas été retenus pour le Mundial du Mexique.
Une fois sa courte mission accomplie, le duo d’entraîneurs va céder la place au revenant Evgueni Rogov, qui aura dans son programme des matches de qualification pour les Jeux Africains de Nairobi et la CAN 1988, tous à disputer contre la même Tunisie et un peu plus tard face au Soudan pour le compte des Jeux Olympiques de Séoul. Au cours de deux matches de préparation, Rogov ménage la chèvre et le chou.
Il rappelle Drid, Megharia, M. Kaci Saïd, Belloumi et Menad et fait en même temps confiance à de nouvelles recrues : N.Mekideche, Benhalima, Kabrane, Belkhatouat, Boukar etc…
L’Algérie gagne à Tunis (2-0) mais elle n’ira pas à Nairobi. A cause d’une stupide question de participation des joueurs professionnels, désormais rendue tout à fait licite par la FIFA mais que la CAF a omis de diffuser. Celle-ci cherche à se rattraper en décidant de faire rejouer le match, ce que l’Algérie refuse et finalement se retire en laissant la qualification aux voisins tunisiens et donc le soin de représenter le Maghreb à Nairobi.
Pour la bonne information de chacun, signalons que la Tunisie ira terminer dernière du tournoi des Jeux de Nairobi.
La polémique prend des proportions invraisemblables de la part d’une partie de la presse algérienne, qui se déchaîne et dépasse les limites de la décence à l’égard du Président de la CAF. Ce dernier, l’Ethiopien Ydenekatchew Tessema, à coup sûr tenu informé de tels reproches, ne va pas se gêner pour se venger froidement de l’Algérie de manière tout à fait discrétionnaire. Rappelons les faits.
La Zambie s’était vue attribuer l’organisation de la phase finale de la CAN 1988. L’Algérie était, elle, la candidate retenue pour la suivante en 1990. La Zambie, pour cause d’émeutes populaires, hésite puis se désiste. Normalement l’Algérie aurait dû être sollicitée pour prendre la relève et suppléer la défaillance zambienne. Elle se déclara d’ailleurs officiellement prête à le faire. Cependant la CAF ne l’entendit pas de cette oreille et M. Tessema va se démener et convaincre le Maroc, qui accepte, de remplacer la Zambie. Gifle élégante, mais gifle tout de même infligée à notre FAF par celui qui, très gravement malade depuis un temps, mourra quelques mois plus tard.
L’Algérie, et cette fois sur le terrain (1-0 et 1-1) écarte la Tunisie et se trouve derechef qualifiée pour la phase finale de la CAN, parce que la Libye, son adversaire du second tour, a été suspendue par la CAF. Pour ces deux rencontres Rogov avait sollicité Madjer ainsi que d’autres expatriés nouveaux venus tels : Rachid Maatar, Abdelaziz MANSOURI, (frère de Fawzi), Cherif OUDJANI (fils d’Ahmed Oudjani) et Lyazid SANDJAK. La préparation s’était effectuée uniquement face à des clubs : Videoton, Belenenses, Marseille, Nantes et enfin Flamengo avec ses internationaux Jorginho, Mozer, Aldair, Renato et Bebeto.
Contre le Soudan, à Khartoum, pour les JO, personne n’a jamais su ce qui s’était passé, sinon que Boukar avait marqué le but algérien du match nul (1-1). Au match retour disputé à Annaba, le stade archi comble n’a d’yeux que pour Rabah Madjer, le héros de la dernière finale de la Coupe d’Europe des clubs champions remportée, en Mai 1987,avec le FC Porto au détriment du Bayern de Munich, grâce à sa talonnade aussi géniale que meurtrière et à une passe décisive, au cordeau qui avait permis au Brésilien Juary d’inscrire le second but, celui de la victoire. Mais en ce début du mois de Juillet, la sélection algérienne va souffrir et être contrainte de jouer une prolongation (1-1) avant de s’imposer (3-1) par des buts signés Menad et Sandjak.
Pour le second tour éliminatoire des JO, l’Algérie sera opposée à la vieille connaissance qu’est le Nigeria après un intermède de Coupe arabe des Nations qui voit l’Algérie battre la Mauritanie(4-0 ) et faire match nul (1-1) avec la Tunisie. Le premier match à domicile contre le Nigeria a lieu à Annaba dans un stade survolté et sous les yeux de Madjer, blessé et qui ne joue pas. L’équipe nationale n’arrive pas à dominer totalement son sujet. On note la présence d’une nouvelle recrue de choix en la personne d’Abdelkader FERHAOUI de Montpellier et celle de Cherif Oudjani, auteur, en début de seconde mi temps, de l’unique but de la partie. Victoire (1-0) qui paraît trop courte avant le match retour.
Un match au cours duquel le Nigeria l’emporte aussi (0-1), avant de faire la décision lors de la deuxième période de la prolongation (0-2). A la trappe donc. Pas de Los Angeles en 1984. Pas de Séoul non plus en 1988 !
LA SIXIEME CAN DE L'ALGERIE
Rogov, bien secondé par Rachid Cherradi, va bientôt commencer à subir toutes sortes de pressions pour le choix des joueurs et la formation de l’équipe avec le sempiternel problème de l’apport des professionnels expatriés. Ceci en vue de la phase finale de la CAN qui approche et qui nous propose dans notre groupe, la Côte d’Ivoire, le Maroc et le Zaïre (aujourd’hui République Démocratique du Congo) à Casablanca.
Le Maroc est chez lui. Personne n’a plus de nouvelles du Zaïre, absent depuis 1976 de cette compétition et la Côte d’Ivoire avait été battue par l’Algérie 2 fois, 18 mois plus tôt. Le pronostic est difficile, mais la qualification est possible. Elle sera tirée par les cheveux, malgré un soutien extraordinaire du public marocain lors des rencontres face à la Côte d’Ivoire et au Zaïre. Les résultats sont mitigés : nul (1-1) contre la Côte d’Ivoire, défaite (0-1) face au Maroc et enfin victoire (1-0) sur le Zaïre, la 100° de notre sélection. Ce qui nous plaçait à la seconde place derrière le Maroc, mais à égalité avec les Ivoiriens, à la fois pour les points, le goal average et la différence de buts. C’est donc une pièce de monnaie qui va départager les deux équipes et permettre notre passage en demi-finale pour aller à Rabat nous mesurer au Nigeria qui avait terminé en tête de son groupe devant le Cameroun, l’Egypte et le Kenya.
Ouvrons une parenthèse ici pour dire que pour ce tournoi africain, Rogov avait convoqué les professionnels Ali BOUAFIA, Ferhaoui et Menad (celui-ci désormais à Nîmes) lesquels, en raison de leurs engagements avec leurs clubs respectifs, eurent à effectuer des va et vient entre la France et le Maroc. Un autre joueur pro, théoriquement le meilleur, Rabah Madjer, qui ne s’entendait plus avec Artur Jorge, son entraîneur à Porto, avait été transféré pour 6 mois au club espagnol du FC Valence, entraîné alors par le célèbre Alfredo Di Stefano. L’attaquant algérien s’était imposé dès son premier match. Malheureusement une méchante blessure à la cuisse, survenue au mauvais moment, l’empêchera de rejoindre ses camarades.
La parenthèse fermée, je dis : que de regrets cette demi- finale face au Nigeria va nous laisser !! Durant la première période, les Algériens n’arriveront que trois fois devant les buts gardés par RufaÏ, laissant toute l’initiative du jeu à des adversaires très actifs dont la pression désordonnée mais constante portera ses fruits à la 39° minute avec l’aide du stoppeur algérien, Abderrazak BELGHERBI qui marque contre son camp après que Rachid Yekini, sautant plus haut que tous les Algériens, eut envoyé la balle sur le poteau gauche de la cage algérienne. Avantage logique devant des algériens qui se sont contentés de voir venir.
La seconde période nous offrira un tout autre visage. De belles combinaisons à deux ou trois joueurs prennent naissance. Les actions collectives à une touche de balle se succèdent. Au fur et à mesure que les minutes passent, l’équipe algérienne prend l’ascendant sur son adversaire à tel point que sur cet immense terrain de Rabat, les Verts algériens paraissent en surnombre.
Quel plaisir de voir des joueurs algériens courir plus vite, devancer l’adversaire et sauter plus haut que lui. Tout ceci sans perdre un instant ni à discuter les décisions arbitrales, ni à se plaindre du jeu trop physique des Nigérians. La seule chose qui manque à cette équipe, c’est la concrétisation à la marque d’une telle domination. Il y a malheureusement encore un dribble de trop ou une mauvaise réception finale.
Le dernier geste n’est pas parfait. Mais chacun reste persuadé que l’égalisation est possible face aux Nigerians désormais réduits à dix, après l’expulsion d’Ademola. Finalement à la 86° minute, sur un corner tiré de la droite par Menad, le ballon est renvoyé par le gardien RufaÏ, puis par un défenseur sur…. la tête de Rachid Maatar qui marque en coin. Ouf !! Egalisation, ô combien méritée !!
Que s’était-il passé dans les vestiaires pendant le repos ? Nous l’ignorons. Toujours est-il que transformée, transfigurée, telle était apparue cette sélection algérienne qui avait gagné les cœurs d’un public marocain survolté et s’offrait ainsi le droit de disputer 30 minutes de jeu supplémentaires.
Lors des premières quinze minutes de la prolongation, cette formation va tout de même souffler un peu.
La deuxième partie sera la répétition de la seconde mi temps, même si les Algériens se retrouvent bientôt eux aussi réduits à dix à la suite d’une méchante agression sur le joueur Maïche qui s’est résigné, la mort dans l’âme, à abandonner ses camarades, alors qu’aucun remplacement n’était plus possible. La domination et le tourbillon algériens continuaient. La règle, non écrite, qui dispose que l’équipe qui égalise finit par l’emporter ne va pas se vérifier. Il faudra donc en passer par la séance des tirs au but.
Deux essais sont ratés par Belgherbi et Maatar et aussi par deux Nigérians. La première série s’achève donc par un 3-3. La seconde ne connaît aucun raté : 8-8. Il faut continuer. Le joueur nigérian marque. C’est au tour de Belloumi de s’exécuter. Il s’élance, ralentit sa course avant de mettre le ballon dans les bras de Rufaï. C’en est fini ! L’Algérie est éliminée ! Comme en 1984, l’épreuve des tirs au but lui aura été fatale : Guendouz à Bouaké, Belloumi à Rabat. Il ne s’agit pourtant pas là ni de novices, ni de joueurs qui perdent facilement leur self-control. C’est peut-être le lot de certains grands joueurs d’avoir ainsi des ratés. Souvenez-vous du quart de finale Brésil-France, en 1986, au Mexique, quand tour à tour, Messieurs Socrates, Platini et Zico échouèrent dans une telle épreuve !! Mince consolation !
Ce dénouement, décevant, nous l’avons vécu, mes deux fils et moi, à Londres, dans les tribunes du stade de Wembley, où nous étions venus assister au match amical Angleterre-Pays Bas (2-2) en ce mercredi 23 mars 1988 ! Première mi-temps suivie à la maison, avant de prendre la voiture pour nous rendre au stade. Le temps d’arriver et de regagner nos places, le match de l’Algérie en était à la séance de tirs au but. Le transistor collé à l’oreille d’Akram, mon fils aîné, attira l’attention d’un spectateur assis dans la rangée juste derrière la nôtre.
SURPRISE ! SURPRISE ! Il s’agissait de Viv ANDERSON, le défenseur international anglais (Nottingham Forest, Arsenal, Manchester United), qui demandait à mon fils ce qu’il écoutait de si intéressant !! Algérie-Nigeria, demi-finale de Coupe d’Afrique, lui a-t-il répondu !!
En nous retournant, nous avons découvert que nous étions assis dans le même secteur que les 5 ou 6 remplaçants de l’équipe d’Angleterre, ne figurant pas sur la feuille de match du jour. Dernière précision : Anderson fut finalement très étonné d’apprendre que le Nigéria avait éliminé
l’Algérie.
Cela faisait tout de même longtemps que l’on n’avait pas vu l’équipe nationale algérienne dans une si belle forme physique. Le mérite en revient à coup sûr à Rogov qui, en professeur avisé, savait qu’afin de pouvoir pleinement étaler ses qualités intrinsèques naturelles, le joueur algérien avait besoin d’être très bien préparé sur le plan physique.
Dans le match pour la 3° place, l’Algérie se révèlera plus motivée que la Maroc et l’emportera finalement aux tirs au but (4-3) après un résultat nul (1-1) durant le temps règlementaire. Quant à la finale, réédition de celle de 1984, elle reviendra à nouveau aux Camerounais vainqueurs (1-0) du Nigeria. L’Algérie se promettant de faire mieux, dans deux ans chez elle ! Le jeune Hakim Meddane, 21 ans, fut la grande révélation et la grande satisfaction algérienne de ce tournoi.
Après 17 mois passés à la tête de la sélection, soit dix de plus que la première fois, E. Rogov rentre chez lui et passe pour ainsi dire le relais à Kamel Lemoui. Joueur international dès le premier match de la sélection algérienne en 1963, il avait également été retenu par Lucien Leduc comme joueur dans la sélection nationale. Il s’était ensuite lancé avec bonheur dans la direction technique des clubs, notamment le Chabab de Belcourt et le Mouloudia d’Alger.
L’objectif principal de Lemoui était les éliminatoires africains pour la Coupe du Monde de 1990, qui devaient débuter en Janvier 1989 avec une nouvelle formule inaugurée par la CAF. A savoir, un premier tour au sein de groupes de 4 pays devant se rencontrer en matches aller et retour et classement aux points. Seul le pays classé premier était qualifié pour la suite. L’Algérie, tête de série, avait ainsi à affronter la Côte d’Ivoire, la Libye et le Zimbabwe. Lemoui disposait de 6 mois pour « fourbir ses armes ».
Comme toujours, en pareille circonstance, le nouveau sélectionneur va se livrer à des essais en convoquant de nouveaux visages, lors de matches amicaux disputés face à différents adversaires, tels l’Angola, la Tunisie, le Mali, et les Emirats, avec parmi eux , tout de même, le retour d’un ancien, Salah Assad qui avait quitté la sélection après le Mundial mexicain en 1986.Mais son come back sera très court. Il se retirera finalement après 12 années, avec 72 sélections et 14 buts marqués après un match gagné contre la Finlande, lors du tournoi de Malte. De même que Lemoui va, pour le premier match officiel, contre le Zimbabwe, faire appel à Madjer et Menad. Initiative opportune, car ces deux joueurs inscriront les 3 buts de la victoire. Le second adversaire sur la liste, la Libye, avait perdu de justesse à Abidjan( 0-1) et Lemoui était sur ses gardes avant de se rendre à Tripoli.
Voyage il y eut, mais de match point !!
Le jour de la rencontre, alors que le stade est plein, que les joueurs sont dans les vestiaires, « les autorités suprêmes » de Libye font savoir qu’entre l’Algérie et la Libye, pays et peuples frères et voisins, il ne saurait y avoir d’opposition, fût-elle sportive ! Un scénario inattendu qui signifiera l’exclusion de la Libye et sa disqualification, l’annulation du résultat d’Abidjan ; le groupe poursuivant sa marche réduit à 3 pays, avec le prochain rendez-vous dans 6 mois à Abidjan.
Depuis environ deux mois, Rachid Mekhloufi avait été installé à la tête de la Fédération algérienne de football par le nouveau Ministre des Sports, dans le nouveau gouvernement constitué après les émeutes sanglantes d’Octobre 1988. Nombreux paraissaient se réjouir de la présence d’un « homme de la partie », ancien international, ancien sélectionneur, respecté et compétent, à la tête de l’instance dirigeante du football national. Sous sa houlette, un programme de rencontres internationales amicales verra le jour s’étalant sur presque 12 mois. Mais en fait il semble que cette nomination ne fut pas du goût de tout le monde, surtout qu’en cette période charnière, assez tendue, la revendication d’assises démocratiques et d’élections libres, dominait largement le paysage national et se fit bien entendu jour au sein des milieux sportifs.
D’autre part, et aussi bizarre que cela paraisse, « le courant ne passait pas très bien » entre Lemoui et Mekhloufi. Témoin, cette guerre de communiqués tout à fait déplacée sur le montant des primes à servir aux joueurs de la sélection, avec précisions, mises au point, rectifications, nouvelles mises au point etc… Un vrai désastre !! Afin de mettre tout le monde à l’aise et croyant sans doute bien faire, Rachid Mekhloufi fit savoir qu’il était prêt à céder sa place à une équipe démocratiquement élue, étant entendu que dans l’intervalle il continuerait à expédier les affaires courantes. Quelle aubaine pour le Ministre qui « sauta » sur l’occasion, rendit hommage au travail effectué par Mekhloufi et installa une nouvelle équipe dirigeante provisoire à la tête de la FAF. Ce limogeage intervint la veille de l’adoption par referendum de la nouvelle Constitution du pays qui, entre autres, établissait la démocratie pluraliste.
Ouvrons ici une autre parenthèse pour dire que l’année 1988 s’est achevée avec la bonne nouvelle de la victoire de l’Entente de Sétif en finale de la Coupe d’Afrique des clubs champions, rejoignant ainsi, au palmarés africain, le MC Alger et la JS Kabylie. Une Entente de Sétif qui, 4 mois plus tôt avait été rétrogradée en seconde Division du championnat d’Algérie ! Avant d’ajouter à son tableau de chasse, la Coupe Afro asiatique aux dépens du Sadd qatari, champion d’Asie !!
Le programme tracé, lui, subsistait. En Février, la sélection algérienne va se distinguer en remportant un tournoi amical à Malte après avoir battu la Finlande (2-0), Malte (1-0) et fait match nul (0-0) contre le Danemark de Brian Laudrup. Les tests amicaux vont se poursuivre face au Maroc (1-1), la Tunisie (2-0), encore le Maroc (0-1) et enfin la Suède (0-2) avec laquelle les liens sportifs avaient pratiquement été coupés depuis 1976. Ce dernier match, à Oerebro, qui eut lieu 10 jours avant le déplacement à Abidjan, avait vu le retour de Belloumi, absent depuis plus d’un an.
Dans la capitale ivoirienne, où l’on note aussi le rappel de Ferhaoui, la défense algérienne formée du gardien Osmani et de Adjas, Adghigh ,Megharia et Lamri, sut tenir en échec les Eléphants locaux et permettre le partage des points (0-0). Deux semaines plus tard la sélection prouve qu’elle voyage bien en allant gagner (2-1) à Harare face au Zimbabwe grâce, une fois de plus à Menad et Madjer. Fin de saison souriante pour la formation de Lemoui, qui mène dans son groupe et tout devrait aller pour le mieux lors du match retour en Algérie contre la Côte d’Ivoire. Sur le plan institutionnel les élections avaient porté Omar Kezzal à la tête de la FAF. Celui-ci, on s’en souvient, avait déjà occupé ce poste entre 1982 et 1984 avant d’être limogé à la suite de l’épisode du match « fantôme » contre la Suisse à Zurich.
Courte victoire (1-0) face aux Ivoirens à Annaba, et voici les portes du dernier tour qualificatif pour le Mondiale, largement ouvertes, au cours duquel l’Algérie sera confrontée à son homologue égyptienne, le deuxième match devant se dérouler au Caire. Un adversaire guère commode si l’on se fie au passé. L’Algérie avait été en 1982 et 1986, la seule équipe africaine à s’être qualifiée deux fois consécutivement pour une phase finale de Coupe du Monde. Cent quatre vingt minutes la séparaient d’une passe de trois historique et fabuleuse.
Lors du match aller, Lemoui et la Fédération vont « abandonner » Annaba pour Constantine. La formation, en 4-3-3, présentée par Lemoui avec un milieu composé de Ferhaoui, Belloumi et Madjer et une attaque dirigée par le revenant Cherif Oudjani, ne sut nullement négocier ce cap malaisé. La plupart des joueurs semblant dans une condition physique qui laissait à désirer, ne furent jamais capables de s’imposer à l’adversaire, qui prendra plusieurs fois l’initiative d’attaques très dangereuses et qui en définitive réussira à préserver ses filets vierges en imposant le nul (0-0). Un résultat tout à fait sécurisant pour les Pharaons, avant le match retour prévu un peu plus d’un mois plus tard.
On ne saura jamais pourquoi Madjer n’a pas été utilisé en pointe puisque lui et Menad (absent) étaient les buteurs attitrés de la sélection ! L’atmosphère n’était pas à la joie dans le camp des supporteurs algériens et Lemoui ne surprendra personne lorsqu’il annoncera sa démission le lendemain du match. Rappelez-vous en 1984, entre deux rencontres avec l’Egypte, Hamid Zouba avait abandonné le navire et cédé le tablier à Khalef ! Comme en 1984, tout était prêt, car le remplacement de Lemoui par Abdelhamid Kermali fut très rapide ( 48 heures ). Le record de 1984 ( 24 heures ) tenait bon ! Notons aussi que le temps dont disposait Kermali (48 jours) battait de peu celui de Khalef (38 jours). Anecdotique et éternel recommencement !! Préparer une échéance importante dans de telles conditions était une véritable gageure ! Un défi au bon sens !
Difficile mais pas impossible ! Rien ne nous empêchait de réussir à « renverser la vapeur » au Caire et ainsi réaliser ce que nous n’avions pu faire à Constantine…telles étaient les réflexions type méthode Coué qui revenaient dans la bouche de certains. Voire !
De longue date déjà, quand Mekhloufi était président de la fédération , était programmée une rencontre amicale à l’invitation de l’Italie, hôte de son Mondiale de 1990, programmée 6 jours avant le match du Caire. Abdelhamid Kermali, un ancien de la glorieuse équipe du FLN, accédait enfin au poste technique suprême, après avoir dirigé les Juniors en 1978/79. Dès sa prise de fonctions il avait déclaré avoir été surpris par la condition physique peu reluisante de nos sélectionnés et il s’arrangera pour disposer d’un match supplémentaire avant d’aller en Italie. Il ne trouvera que la Tunisie comme sparring-partner (0-0) à Tunis.
Quelques jours plus tard à Vicenza, ville de Vénétie, les seuls pros présents sont Amani et Madjer dans une formation à visage résolument défensif pour faire face à une Squadra Azzurra au grand complet bien entendu. On retiendra de ce match la prestation quasi héroïque du gardien El Hadi Larbi et aussi que la sélection algérienne se créa une seule occasion assez favorable, que Belloumi gâcha par un tir défectueux. En seconde mi-temps, les Italiens vont « réussir l’exploit » de marquer un but validé par l’arbitre yougoslave Petrovic, alors que pas moins de 3 joueurs italiens, dont le buteur Serena, étaient hors jeu. Encore une fois, les images de la télévision étaient là pour prouver l’erreur arbitrale patente.
Du côté algérien, les avis étaient partagés, selon que l’on jugeait que notre sélection avait bien résisté à une des meilleures équipes du monde, ou bien l’on estimait que la « prudence » de Kermali avait confiné à la crainte ; crainte d’une déroute qui n’eut pas lieu. En fait le schéma adopté à Vicenza, un seul attaquant de pointe, Madjer, annonçait ce qui allait se passer au Caire. Dans la capitale égyptienne, Ferhaoui prend la place de Saïb dans l’entrejeu et Menad est rappelé en renfort en attaque.
Chez les Egyptiens, sous la direction de Mahmoud El Djohari, personne ne doute un instant que le but allait être atteint, à savoir, se qualifier pour une phase finale de Coupe du Monde, 56 ans après la première participation en 1934, en Italie déjà ! Pour les médias cairotes, cela et le reste, tout était bon pour chauffer le public et l’atmosphère. Il est honnête de signaler que Kermali avait trempé dans la querelle médiatique. Dans une interview au quotidien algérien de langue arabe Echaab, il fit part de son appréhension à l’égard de l’arbitre tunisien Ali Bennacer devant diriger le match du Caire. La réaction ne tarde pas à venir de la presse tunisienne et d’une réponse de Bennacer lui-même. Les choses s’envenimèrent quand on eut appris que cet arbitre désigné pour un match à Oran pour la Coupe d’Afrique des clubs, s’était désisté au profit d’un de ses collègues tunisiens.
On se pose la question : quelle mouche a bien pu piquer Kermali ? Manque de tact, maladresse ou alors démarche qu’il pense géniale, visant à mettre en garde l’arbitre ? Nul ne le sait. Le fait est que dans de semblables circonstances, il existe des procédures officielles consistant à récuser un arbitre, en présentant des arguments solides et sérieux. Ce qui n’a pas été fait. Ou alors se taire et tâcher de l’emporter sur le terrain.
Sur le terrain malheureusement, les choses allaient mal tourner dès la 4° minute, quand Rabie Yassine, seul à l’aile gauche, vient d’hériter d’un renvoi hasardeux de Megharia. L’arrière égyptien centre en direction des 6 mètres algériens où Hossam Hassan, devançant gardien et défenseurs, va marquer de la tête. Mauvais début. Mauvais présage, puisque c’est une phase de jeu similaire qui, en 1984, avait entraîné l’élimination de notre équipe. Et pourtant à Vicenza, Larbi avait su faire face de manière exceptionnelle, au cours de nombreuses actions semblables contre les attaquants italiens. Il prétendit avoir reçu un coup (nullement évident sur les images de la télévision) qui l’empêcha d’intervenir. Il sera d’ailleurs remplacé par Osmani et ne revêtira plus jamais le maillot de la sélection.
L’Egypte, elle, tenait le bon bout. Mais il faut dire que les nôtres ne surent jamais réagir et montrer qu’ils étaient capables d’inscrire le but chez l’adversaire, synonyme de qualification. Manque de conviction, de meneur et de buteur…oui encore et trop à la fois. Grâce à un but solitaire, l’Egypte avait gagné son ticket pour l’Italie. Ce qui se passera à la fin du match sera un véritable calvaire pour certains joueurs pris à partie et victimes de provocations même à leur retour à l’hôtel où résidait la délégation algérienne. C’est là que Belloumi sera accusé par un médecin égyptien de l’avoir grièvement blessé à l’œil en brisant une vitre dans le hall. Cette histoire ira en justice, entraînant la condamnation du joueur algérien, avec poursuites via Interpol…Pendant longtemps l’affaire n’est pas close et Belloumi, gloire du football algérien, ne pourra pas quitter le territoire national et répondre aux nombreuses invitations qui lui sont adressées pour se rendre à l’étranger.
Ce sera là l’occasion de la fin de la carrière internationale de ce joueur, ayant inscrit 25 buts et contribué pendant 11 années au sein de l’équipe nationale avec 97 sélections, record absolu encore debout. Sans les deux blessures qui l’ont tenu éloigné des terrains pendant une année, Belloumi aurait largement franchi le cap des 100 sélections.
Double joute, comme à l’accoutumée, crispante, décevante et chargée de frustrations. Tout cela a conduit à une atmosphère détestable, avec des témoignages, des mises au point, des éclaircissements et autres déclarations qui bien entendu ne servaient nullement l’avenir. Un avenir proche ou éloigné au cours duquel Algériens et Egyptiens étaient condamnés à d’autres rencontres sportives à tous les niveaux et dans toutes les disciplines.
Fermons ici ce feuilleton égyptien. Il rebondira quelques mois plus tard.
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